Le livre audio : un nouvel ebook qui continue de croitre
25/09/2018
Le livre audio est de loin le secteur de l’édition rencontrant la plus forte croissance sur les dix dernières années. Le magazine Vulture s’est penché sur son histoire aux États-Unis, ses progrès et « ses casting de rêve ».
Il y a plus de 20 ans, à l’époque où Beth Anderson a rejoint les équipes du premier éditeur de livres audio, Audible était une start-up indépendante. Au départ Audible avait inventé un lecteur MP3 de 4 méga-octets avec un abonnement à 15 dollars par mois (12,75 euros) pour 12 livres par an. Puis avec les évolutions technologiques, le CD disparaît pour laisser la place au streaming.
A l’instar des ebooks dans lesquels Amazon a rapidement investi, les six plus grands éditeurs de logiciels traditionnels ont commencé à s’adapter et Amazon a racheté Audible en 2008. L’audio a souvent été un second choix pour les éditeurs, et par conséquent, de nombreux titres n’ont pas été enregistrés.
« Certaines personnes se plaignent du fait d’avoir laissé Amazon acheter Goodreads », explique un éditeur désabusé, interrogé par Vulture, en faisant référence à l’approvisionnement par la foule. « Mais Audible fut la plus grosse erreur ». En laissant passer la chance d’acheter ou de s’associer avec Audible ou un concurrent comme Recorded Books ou Brilliance Audio, les éditeurs se sont tirés une balle dans le pied : « nous avons choisi de pas rejoindre la catégorie de la croissance rapide. C’est un mauvais choix commercial ».
Audible a toujours expérimenté diverses manière de croitre et de se diversifier, comme avec la participation de Robin Williams à un show télé en 2000 et le choix d’un casting de tête d’affiche pour les derniers livres enregistrés. Cependant, la plateforme ACX d’Audible, lancée en 2011 pour permettre aux auteurs d’enregistrer leurs livres audio de manière indépendante a eu l’effet d’un électrochoc pour « les éditeurs [qui] ont commencé à se dire » qu’il faudrait « enregistrer plus de livres audio », selon Michelle Cobb, directrice de l’Association des éditeurs audio (APA).
À ce jour, les principaux éditeurs, disposent tous de leur propre département de livres audio, expérimentant aussi l’enregistrement de pièces de théâtre. Mais Audible, qui outre son activité de production, est le distributeur de tous les livres audio du marché, recherche son projet qui fasse un coup commercial : ils ont notamment obtenu des exclusivités comme pour Michael Lewis, John Scalzi et d’autres. Recorded Books, un concurrent de la filiale d’Amazon, a récemment été racheté par KKR, faisant certainement accroitre son pouvoir d’achat et encourageant la compétition sur le segment.
Les sociétés de livres audio ont encouragé l’innovation mais aussi les dépenses, en rachetant les droits invendus pour certains titres. Un grand agent affirme qu’Audible a payé deux fois plus pour les droits audio du livre de son client que l’éditeur au format papier. Selon lui, « les cinq grands [éditeurs] n’abandonneront pas les droits audio, la seule façon pour Audible d’acquérir du contenu de marque, c’est d’offrir une somme astronomique à l’agent qui serait prêt à vendre le titre à Houghton Mifflin ou Norton ». Deux des plus grands éditeurs indépendants ne possédant pas de département audio, la surenchère devient la norme entre acteurs installés sur l’audio et acteurs prévoyant d’y entrer.
Contre toute attente, les petits éditeurs profitent des querelles entre les producteurs de livres audio et les grands éditeurs : les livres audio d’Audible peuvent permettre à un auteur d’avancer plus vite que chez un éditeur comme Penguin Random House qui n’aurait pas le budget. Morgan Entrekin, éditeur de Grove Atlantic explique : « nous nous engageons dans des acquisitions que nous n’accepterions probablement pas, à cause du prix qu’Audible et d’autres sociétés acceptent de payer ». Rappelons que les livres audio ont représenté 5% des revenus de l’édition commerciale l’année dernière.
Beth Anderson, affirme que les exclusivités comme celle de Michael Lewis, ainsi que les versions améliorées de Margaret Atwood ont très bien fonctionné, et que les abonnés achètent cinq livres supplémentaires en plus des douze annuels. Selon elle, Audible a enregistré une croissance à deux chiffres du nombre de ses abonnés en l’espace d’un an.
Certes, les ebooks se sont rapidement développés, alors que les éditeurs déploraient la disparition des livres physiques et des librairies Mais désormais, les ventes sont en baisse pour les ebooks, et les livres physiques croissent lentement. En sera-t-il de même pour les livres audio ? Les ventes à l’unité ont augmenté de 21% l’an dernier, contre 34% en 2016 selon l’APA qui commente : « Nous avons une marge de croissance importante […] et beaucoup [d’éditeurs] se lancent sur le marché. Nous ne voyons aucun signe de ralentissement ».
Source : Vulture / Crédits illustrations : CC0 License
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